Skinner avait défini le concept de règle comme équivalent à un stimulus spécifiant la nature des contingences. Toutefois, son analyse n'était pas complète en ce sens qu'elle n'incluait pas les processus nécessaires chez l'auditeur pour que la règle puisse être comprise.
Les processus de cadrage relationnel étudiés par la TCR décrivent comment des mots et des phrases acquièrent une signification pour celui qui les entend (Hayes & Hayes, 1989), préalable indispensable pour qu'une règle au sens où l'entendait Skinner d'un stimulus spécifiant la nature des contingences puisse avoir une influence sur le comportement.
Nous distinguons avec des néologismes trois modalités fonctionnelles selon lesquelles une règle peut exercer son influence (Zettle & Hayes, 1982): La pliance («ply»), le pistage («tracking») et l'augmentage («augmental»).
La première et la plus simple des façons dont nous apprenons à suivre une règle correspond au concept d'obéissance : nous sommes récompensés pour avoir suivi la règle et punis pour l'avoir transgressée. Je mets mon bonnet pour que maman soit contente, ou pour éviter qu'elle soit fâchée. Ce type de règle est donc suivi en raison de renforcements d'ordre social. En fonction des conditions émotionnelles de renforcement et de punition avec lesquelles elles ont été assorties, certaines des règles qui nous ont été fixées pour être une bonne fille ou un bon garçon vont s'avérer extrêmement résistantes à toute modification et la moindre velléité de nous comporter autrement que ce qu'elles nous prescrivent pourra mobiliser une réaction émotionnelle intensément aversive à laquelle nous n'échapperons qu'en nous montrant, une fois encore, obéissants, «compliants», d'où le terme de «pliance». Il est important de noter que les comportements de rébellion ou de résistance pour lesquels nous utilisons le terme de «contrepliance» ne diffèrent pas fondamentalement de la pliance en ce sens que, quand on prend systématiquement le contre-pied d'une règle établie, ce sont une fois encore les conséquences d'ordre social et non les contingences naturelles qui déterminent le comportement. Il y a donc une grande similitude fonctionnelle entre les actions d'obéissance et les actions de révolte.
Nous apprenons ensuite à suivre une règle par l'expérience de récompenses et de punitions qui ne sont plus dispensées par des personnes, mais simplement par le résultat de notre comportement. Si la règle représente un «mode d'emploi» correct du monde qui m'entoure, les conséquences d'un comportement conforme à la règle seront renforçantes. Je mettrai maintenant mon bonnet quand il fait froid parce que j'ai fait à maintes reprises l'expérience qu'il m'apportait un confort accru. Une telle règle me signale quel est le chemin à suivre pour arriver au but qui est le mien, d'où le terme que nous avons choisi pour traduire le concept de «tracking». Toute pliance nécessite qu'un membre de la communauté verbale fasse une discrimination à propos de la source du comportement qu'il observe. Dans ce sens, la contingence impliquée dans la pliance est toujours arbitraire. Par contraste, le pistage met celui qui suit une règle en contact avec les contingences naturelles qui vont déterminer si le comportement sera maintenu. Signalons en passant que la distinction «naturel/arbitraire» n'est pas la même que la distinction «non-social/social». Une règle disant à quelqu'un comment se comporter pour être aimé par les autres pourrait par exemple constituer une instance de pistage. La distinction entre pliance et pistage est fonctionnelle et non formelle. Une règle peut être présentée sous toutes les apparences d'une piste et induire néanmoins une pliance. L'adolescent auquel son père dira de manière parfaitement pertinente : «Tu n'auras que des ennuis si tu continues à fréquenter ce genre d'amis» va probablement lui rétorquer qu'il devrait cesser d'essayer de le contrôler. (Hayes et al. 1999, p. 36)
La façon probablement la plus élaborée dont nous pouvons suivre une règle correspond à la notion d'augmentage. Un augmenteur est une règle qui va modifier la manière dont un événement fonctionnera en tant que conséquence d'un comportement. La publicité fait un usage étendu de cette forme de règles. Si nous entendons, un jour d'été, la voix sortant du poste de radio nous suggérer qu'un bon coca bien glacé serait vraiment la manière la plus cool de nous passer la soif, il y a des chances pour que la fonction renforçante de cette boisson soit au moins momentanément accrue pour bon nombre d'entre nous. Les processus d'augmentage sont en relation avec la notion de valeur et nous les utilisons dans le travail thérapeutique pour construire la motivation nécessaire au changement.
Si elle ouvre d'innombrables possibilités à l'humain, l'aptitude à voir son comportement influencé par des règles a un prix : le comportement gouverné par des règles est en effet remarquablement résistant à des changements dans les contingences naturelles. Dans une expérience (Hayes et al., 1986) où un groupe de sujets avaient appris à résoudre un problème par l'expérience d'essais et d'erreurs et l'autre par une règle apprise, seule la moitié de ce du second groupe ont pu le résoudre quand les données en avaient été modifiées à leur insu tandis que l'ensemble des sujets du premier groupe y parvenaient.