2.1. Vous avez dit comportementale ?
2.1. Vous avez dit comportementale ?
Le behaviorisme et la personne de B.F. Skinner sont associés, en particulier dans le domaine francophone, à des images négatives. Le behaviorisme radical de Skinner est confondu avec le behaviorisme méthodologique ou behaviorisme «stimulus-réponse» de Watson. Comme l'expérimentation animale portant principalement sur des rats et sur des pigeons a joué un rôle fondamental dans les recherches de Skinner, on lui a reproché de vouloir réduire l'être humain à ce qu'il a en commun avec les animaux, reproche encore étayé par le fait qu'il a adopté une position déterministe mettant en question la notion de liberté. Dans l'avant-propos qu'il a rédigé à la traduction française de «Science et comportement humain», A. Dorna résume la manière dont Skinner est vu en France : Disons brièvement que l'oeuvre scientifique et "morale" de Skinner se trouve entourée d'une étrange inimitié au sein des milieux académiques et intellectuels en France. Certains jugements, transmis généralement de bouche à oreille, sont repris par des journalistes désinformés et également par des enseignants au point que des "bruits de couloir" sont présentés comme des "vérités" incontestables à force de les marteler sans discernement.
Il faudrait écrire un livre ou plusieurs pour réfuter ces critiques. D'autres s'en sont chargés. On lira avec profit l'ouvrage de Marc Richelle B.F. Skinner ou le péril behavioriste. J'en extrais le passage suivant : Pour le behavioriste (...) la psychologie, si elle veut être une science, doit se donner pour objet des phénomènes observables à l'aide des méthodes habituelles des sciences de la nature; elle doit rechercher objectivement les variables dont ces phénomènes sont fonction. Cette position a paru à beaucoup inadmissible, parce qu'elle réduirait le champ de la psychologie aux seuls actes moteurs accessibles à l'observateur et en exclurait ces innombrables événements intérieurs que tout être humain sait se dérouler en lui. En fait, c'est se méprendre sur le parti pris méthodologique du behaviorisme. Il ne nie nullement les phénomènes intérieurs. Mais, d'une part, il dénie au sujet l'aptitude à en fournir une analyse scientifique (il rejoint en cela les positions de Freud et de Janet); d'autre part, il dénie aux événements psychiques internes, ou, si l'on veut, aux événements mentaux, un statut foncièrement différent de celui des conduites aisément observables de l'extérieur. Le problème de la psychologie est de les rendre accessibles à l'analyse, de les traiter comme des comportements et non comme des sources abstraites et invérifiées de comportements. L'antimentalisme, qui constitue l'un des traits dominants du behaviorisme actuel, n'est pas négation des événements mentaux, mais refus de les invoquer comme explication.
La définition opérationnelle des concepts utilisés en psychologie est considérée par le behaviorisme skinnérien comme un critère de premier ordre pour la validité scientifique du discours.
Dans leur présentation de la psychothérapie analytique fonctionnelle (Functional Analytic Psychotherapy), une thérapie appartenant comme ACT à la troisième vague des thérapies comportementales, Kohlenberg et Tsai décrivent les tenants et aboutissants du behaviorisme radical : Le behaviorisme radical est une théorie riche et profonde qui tente de s'approcher des racines du comportement humain. Les lapsus, l'inconscient, la poésie, la spiritualité, la métaphore figurent parmi les sujets qui ont été discutés par les behavioristes radicaux. Les sentiments et les autres expériences privées sont pris en compte et "les stimulations prenant naissance à l'intérieur du corps jouent un rôle important dans le comportement." (Skinner, 1974) (...) Skinner rejette l'idée selon laquelle, quand nous connaissons quelque chose, l'expression de notre connaissance est constituée par une représentation de ce que l'objet de la connaissance est et que l'objet de notre connaissance a une identité plus ou moins permanente comme un élément réel de la nature. Nous "chosifions" volontiers des événements parce que nous avons l'habitude de discourir à propos d'un monde composé d'objets dont nous avons la sensation qu'ils possèdent une consistance et une stabilité inhérentes. En fait, le but de découvrir des vérités objectives que la science s'était fixé s'est avéré impossible à poursuivre. Au coeur de la science il y a soit le comportement des scientifiques, soit les artefacts produits par leur activité, et le comportement scientifique est vraisemblablement contrôlé par le même genre de variables qui gouvernent tous les autres aspects de la complexité du comportement humain. Le chercheur n'est donc rien de plus qu'un organisme en train de se comporter si bien que les intérêts et les activités de l'observateur scientifique ne peuvent jamais être complètement désintriqués des observations qu'il produit. Cette position anti-ontologique de Skinner se rapproche d'un point de vue constructiviste ou Kantien.
Si Skinner s'est intéressé au comportement des animaux, c'était pour pouvoir ultérieurement construire sur des bases conceptuelles solides étayées par des travaux expérimentaux reproductibles et vérifiables, une psychologie qui rendrait compte du comportement humain. En 1938, il écrivait dans les dernières pages de «The Behavior of Organisms» : Le lecteur aura remarqué qu'il n'est pratiquement fait aucune allusion à une possible extension au comportement humain dans cet ouvrage. Cela ne signifie pas que l'intérêt pour le comportement du rat est présenté comme une fin en soi. L'importance qu'il y a à développer une science du comportement dépend en grande partie de la possibilité de l'étendre ultérieurement aux affaires humaines. (...) Il n'est pas possible pour le moment de dire si une telle extrapolation est ou non justifiée. Il est possible que le comportement humain présente des particularités qui requerront une approche différente. (...) Je puis dire que les seules différences que je m'attends à voir mises en évidences entre le comportement du rat et celui de l'être humain (hormis une immense différence en matière de complexité) résident dans le domaine du comportement verbal.
L'étude du comportement verbal a occupé Skinner pendant toute la seconde partie de sa carrière. L'ouvrage dans lequel il a présenté sa théorie du langage (Verbal Behavior, 1957) n'a pas permis le développement d'une ligne de recherches expérimentales fructueuses. La théorie des cadres relationnels représente une nouvelle manière de concevoir une théorie fonctionnelle du langage reposant sur les principes fondamentaux du behaviorisme.
2.1.1. Quelques notions fondamentales
2.1.1. Quelques notions fondamentalesLes expériences classiques de Pavlov sur la salivation des chiens ont abouti à la notion de conditionnement répondant. Si on présente de la nourriture à un chien, pour peu qu'il en ait été privé depuis suffisamment longtemps, ce stimulus va déclencher une réponse, en l'occurrence la production de salive. Cette relation entre un stimulus et une réponse n'a pas à être apprise ou conditionnée.
Si l'on fait régulièrement précéder la présentation de nourriture par le tintement d'une cloche, le son de la cloche acquerra bientôt la fonction qui est celle du stimulus nourriture dans le contexte en question : Le tintement de la cloche conduira donc aux mêmes conséquences que la présentation de nourriture.
Le phénomène du conditionnement répondant s'observe essentiellement dans les réactions autonomes médiatisées par le système nerveux neuro-végétatif. Les réponses ainsi conditionnées ne dépendent que très peu de leurs conséquences, contrairement à ce qu'on observe dans le conditionnement opérant, dont le paradigme demeure la situation expérimentale inventée par Skinner avec la fameuse «boîte» dans laquelle un rat reçoit un granule de nourriture à chaque fois qu'il appuie sur un levier. Une telle situation expérimentale simple permet de définir de manière précise et reproductible des termes sur lesquels on pourra édifier une construction théorique solidement fondée.
Ainsi, un opérant est une classe de réponses définie de manière fonctionnelle. Dans l'exemple de base que nous avons choisi, l'opérant est donc constitué par l'ensemble des réponses qui vont avoir pour conséquence la présentation de nourriture. Il faut remarquer qu'une telle définition est fonctionnelle et non topographique. Il importe peu que le rat utilise les pattes de devant pour appuyer sur le levier. S'il s'assied dessus ou qu'il l'actionne avec le museau, ces réponses seront également considérées comme faisant partie de l'opérant. Lorsque les réponses appartenant à une classe donnée augmentent en fréquence quand chacune d'entre elle est suivie par une certaine conséquence, on dit que cette réponse a été renforcée.
Une modification simple de notre expérience de base permet de définir un terme supplémentaire : Si l'abaissement du levier par le rat ne conduit à la présentation d'un granule de nourriture que lorsqu'une lumière verte est allumée, la lumière verte acquerra bientôt la fonction d'un stimulus discriminatif. Skinner (Science et comportement humain, 2005, p. 110) utilise le vocabulaire suivant : «Nous décrivons les contingences en disant qu'un stimulus (la lumière) est une occasion pour une réponse (...) d'être renforcée.»
Hineline et Wanchisen (Hineline, P.N, Wanchisen, B.A, Correlated Hypothesizing and the Distinction between Contingency-Shaped and Rule-Governed Behavior, in Hayes, 1989) soulignent les subtilités inhérentes à une approche apparemment simpliste : «Le comportement opérant est par principe un comportement interprété en relation avec ses conséquences, les événements le précédant ou l'accompagnant jouant un rôle favorisant, "occasionnant" ou modulateur. Les rapports entre le comportement opérant et les événements qui l'entourent impliquent un mode particulier de causalité interactive que Skinner (1981) a appelé la "sélection par les conséquences", le comportement et ses conséquences dans l'environnement constituant en l'occurrence des relations en boucle fermée. L'entité ainsi sélectionnée est mercurielle : Elle n'est jamais présente comme un tout; on peut certes y discerner une organisation mais c'est celle d'un motif en activité plutôt que celle d'une structure matérielle. Il y a dans ce concept central de l'analyse du comportement une subtilité et un aspect abstrait qui demeurent souvent ignorés. L'opérant (notion à laquelle il faudrait, pour être précis, toujours adjoindre le terme de classe) est une entité impalpable en raison de sa dispersion.»
Catania (Learning, 4th Ed.1998, p. 410) décrit comme suit la notion de stimulus : «Tout événement physique, toute combinaison d'événements ou relation entre événements.» Il signale encore que l'absence d'un événement peut constituer un stimulus et insiste lui aussi sur la notion de classe, que ce soient des classes définies par des propriétés physiques comme l'ensemble des lumières s'inscrivant dans un certain registre de longueurs d'onde et d'intensités ou des classes définies par certaines fonctions comportementales (par exemple une classe de stimuli discriminatifs efficaces dans un contexte donné.)
Lectures recommandées : Science et comportement humain est un des rares ouvrages de Skinner actuellement disponibles en traduction française. La lecture en est parfois difficile mais toujours intéressante.
La quatrième édition du passionnant (et parfois ardu...) Learning de Catania n'est malheureusement disponible qu'en anglais.
2.1.2. La définition opérationnelle des termes utilisés en psychologie
2.1.2. La définition opérationnelle des termes utilisés en psychologieLe behaviorisme radical attache de l'importance à une définition opérationnelle des concepts qu'il utilise.
Ce point a été développé de façon simple par E. Reese en 1966 dans «The analysis of human operant behavior» :
Ce qui caractérise le scientifique, c'est l'attitude d'objectivité et d'«honnêteté intellectuelle» qu'il adopte vis-à-vis de son objet d'étude ainsi que l'insistance avec laquelle il se concentre sur des données empiriques observables et mesurables. Une description scientifique du comportement commence avec l'observation d'un certain comportement. Vous pourriez par exemple, en traversant le campus avec un ami par une journée bien ensoleillée, constater que ses pupilles deviennent très petites et remarquer aussi, plus tard, peut-être au crépuscule, que ses pupilles sont bien plus grandes. Vous pourriez alors attirer son attention sur le phénomène et apprendre une des premières principales règles de la science : Elle doit pouvoir être communiquée. Afin de communiquer avec d'autres personnes qui souhaiteraient vérifier ses découvertes, le scientifique doit être en mesure de définir ses termes; le mode de définition en usage est la définition opérationnelle. Une définition opérationnelle décrit ce qu'il faut faire (y compris les mesures à effectuer) pour d'observer le phénomène défini. (Nous utilisons le terme «observer» dans le sens de voir, entendre, ressentir, sentir [tactile ou gustatif] ou discriminer de tout autre manière.) Les opérations définissant le changement de taille de la pupille que vous avez observé pourraient simplement consister dans le fait de disposer une règle graduée à proximité de l'oeil d'une personne et de mesurer le diamètre de la pupille à différentes heures de la journée.
Dans «On the principle of operationism in a science of behavior», un article publié en 1975 par Jay Moore dans la revue «Behaviorism» qui est recommandé comme une bonne introduction aux questions difficiles mais fondamentales discutées dans l'article publié en 1945 par Skinner sur la question, on trouve la définition originale du principe d'opérationisme formulée par le physicien P.W. Bridgman en 1927 : Chaque concept que nous utilisons ne signifie rien de plus qu'un ensemble d'opérations. Si le concept est physique, comme la longueur par exemple, il s'agit alors d'opérations physiques concrètes, c'est-à-dire celles par lesquelles la longueur est mesurée. Si le concept est mental, comme celui de la continuité mathématique, il s'agira d'opérations mentales, à savoir celles par lesquelles nous déterminons si une certain aggrégat de magnitudes est continu. Moore souligne que quand bien même ce principe visait en premier lieu à clarifier la pensée critique en physique, il a été favorablement accueilli comme une découverte méthodologique importante pour la pensée scientifique en général. S.S. Stevens devait publier dans les années 20 une série d'articles dans lesquels il a établi une interprétation du principe d'opérationisme pour l'adapter à la science psychologique, interprétation qui a bientôt été acceptée par l'ensemble de la discipline. L'article de Moore fait le point des particularités de l'interprétation du principe d'opérationisme données par Kantor en 1938 puis par Skinner en 1945.
Le 18 février 2006, Jacqueline A-Tjak disait sa difficulté à comprendre la définition donnée par Skinner d'une observation scientifiquement valable :
Une observation ne peut prétendre à la validité scientifique que quand elle a été contrôlée par des événements-stimuli particuliers (essentiellement ceux de nature non-verbale) et par une histoire générale de renforcement pour le fait de parler de manière contrôlée par ce type d'événements, par opposition au fait de parler sous le contrôle de facteurs liés à la composition de l'audience, d'états de renforçabillité etc.
Kelly Wilson lui a répondu le même jour (vous trouverez le texte original anglais de sa réponse sur la page où les membres de l'ACBS peuvent aussi télécharger le fameux «article de 1945»)
Skinner parle ici du concept de définition opérationnelle. Il a participé en 1945 à un séminaire consacré à cette question. Sa contribution, intitulée «Operational Analysis of Psychological Terms» est bien connue des accros de l'analyse du comportement qui l'appellent simplement «l'article de 1945». Nous l'y voyons développer un point de vue sur l'opérationisme bien différent de celui de la plupart de ses contemporains. Il y affirme essentiellement que c'est dans ses déterminants, c'est-à-dire dans son contexte, que réside la signification d'un terme. Ainsi, si nous voulons connaître la signification d'un terme, il nous faut une analyse des conditions contextuelles qui l'ont généré et qui le maintiennent (les stimuli discriminatifs, les stimuli renforçateurs, les opérations d'établissement). Dans l'article de 1945, Skinner propose que nous soumettions le discours des scientifiques à la même analyse que tout autre comportement. Les répercussions sur la question de la «validité» des observations verbales d'un scientifique sont les suivantes : Dans la mesure où le comportement du scientifique est renforcé de manière prédominante par une capacité accrue à prédire et influencer les événements (principalement non-verbaux) qui constituent son objet d'étude, ses observations sont «valables.» Dans la mesure où elles sont renforcées par des renforçateurs dispensés par la société comme l'argent, la réputation, les éloges (plutôt que par une capacité accrue à prédire et influencer), elles sont «invalides». Je pense que c'est ça qui est vraiment radical dans le behaviorisme radical : L'accent mis sur la nécessité de ne pas appliquer l'analyse seulement au comportement des organismes faisant l'objet de l'expérience, mais aussi à celui du scientifique qui l'effectue et à celui du théoricien dont les constructions intellectuelles ont orienté la recherche.
Pour un analyste du comportement, comprendre les déterminants dans le contexte, c'est tout simplement ce que nous appelons comprendre.
Je dis à mes étudiants que s'ils veulent comprendre ce que Skinner veut dire dans pratiquement tout ce qu'il écrit, c'est dans l'article de 45 qu'ils trouveront la clé du royaume. Le Skinner de 1945 est un homme en pleine maturité. Il a dans les années qui ont suivi raffiné et élaboré son analyse, mais c'est ici qu'on en trouve le coeur et l'esprit. Il y a dans ce petit article toute l'épistémologie de Skinner, sa théorie générale, sa théorie du comportement verbal. Si vous comprenez ce que Skinner écrit ici, alors vous pouvez passer à la lecture d'«Au-delà de la liberté et de la dignité» et de «About Behaviorism» et voir ce qu'il en fait dans ces livres provocateurs.
Inutile de le dire, en tant qu'accro de la psycho, j'aime cet article. J'aimerais ajouter que ce qu'écrit Jay Moore sur l'opérationisme est bien plus facile à lire que l'article de Skinner (...)
2.1.3. Le conditionnement aversif
2.1.3. Le conditionnement aversifUne des raisons pour lesquelles le comportementalisme a mauvaise presse réside dans l'assimilation qui en est faite avec des techniques de conditionnement aversif telles qu'elles ont été illustrées dans le film de Stanley Kubrick «Orange mécanique».
Les manuels de thérapie comportementale (comme par exemple l'ouvrage classique de Martin et Pear) mettent en garde contre les risques inhérents à l'utilisation des techniques aversives et les questions éthiques qu'elles posent. L'excellent Coercion and its Fallout de Murray Sidman n'a jamais été réédité (ni traduit en français) mais reste disponible d'occasion. On peut en résumer le propos comme suit : Les techniques aversives de modification du comportement sont efficaces mais elles ont des effets secondaires dévastateurs. Elles peuvent conduire à la suppression temporaire du comportement visé mais n'ajoutent rien au répertoire comportemental du sujet chez qui elles favorisent l'émergence de stratégies de dissimulation, d'échappement et de fuite, la personne ou l'instance administrant la contrainte ou la punition acquérant automatiquement le statut d'un stimulus aversif.
Skinner était un utopiste qui rêvait de développer une science du comportement qui permettrait de définir et de mettre en place des conditions de vie garantissant à chacun le maximum de liberté (voir à ce propos son ouvrageWalden 2). Cette position continue à inspirer ceux qui se réclament de la tradition behavioriste. La notion de liberté n'est pas incompatible avec une position déterministe. Nous pouvons concevoir la liberté comme un état dans lequel notre comportement est soumis à un minimum d'influences résultant de processus de conditionnement aversif.
D'un point de vue théorique, les points suivants sont importants pour comprendre la thérapie ACT :
1. L'association d'une conséquence punitive avec un stimulus quelconque donne lieu à un conditionnement aversif. Lors de présentations futures du même stimulus, les conséquences pour l'organisme conditionné seront de trois ordres:
a. Une réaction neurovégétative
b. Le déclenchement de comportements d'évitement
c. La cessation de tout autre comportement dans lequel l'organisme était engagé. Le conditionnement aversif a donc pour conséquence un rétrécissement marqué du répertoire comportemental.
2. Le langage et la forme d'intelligence qui lui est associée (et qui le rend possible) représente un mécanisme de survie particulièrement efficace. Il a aussi ses inconvénients : Des objets et des notions qui ne sont pas présents peuvent donner lieu à un conditionnement aversif chez l'être humain. On sait que beaucoup de chiens connaissent des réactions anxieuses marquées devant les feux d'artifice habituellement tirés lors de la fête nationale suisse qui est aussi un événement à l'occasion duquel rues et maisons sont pavoisées; on n'a cependant jamais vu un chien se mettre à trembler devant un drapeau suisse, alors qu'un être humain est capable de ce type d'extension qui peut se poursuivre à l'infini et qui a notamment pour conséquence que des notions abstraites et des «événements privés» comme des pensées, des émotions ou des sensations corporelles peuvent donner lieu à un conditionnement aversif chez l'homme avec pour conséquence les trois réactions 1a, b et c décrites plus haut.
Le but du traitement n'est pas tant de réduire les composantes 1a et 1b que de restaurer autant que possible une flexibilité comportementale en présence du stimuli aversif. Nous aimerions que, en même temps qu'il a peur, le sujet puisse continuer à s'engager dans des activités autres que l'évitement et la fuite. Ce but est poursuivi grâce à des exercices d'exposition, d'activation comportementale et de défusion.